Mon enfant est-il intelligent?
J'ai trouve cet article dans une newsletter de Bayard Presse (Pomme d'Api). Pour Bruno Hourst, ancien enseignant et chercheur, il y a plusieurs formes d’intelligence à découvrir chez nos enfants pour les aider à devenir des adultes épanouis.
Mon avis: A lire... Quel bon sens ce Bruno Hourst! Cela va en rassurer plus d'une! Il faut arreter de systematiser les enfants qui ne rentrent pas dans le moule scolaire! Vive les intelligences... longue vie au système Montessori...!
Vous nous incitez à observer comment nos enfants sont intelligents. Il y a donc plusieurs manières d’être intelligent ?
Bruno Hourst : C'est l'évidence même, quand on y réfléchit. Prenez des personnes reconnues comme exceptionnellement intelligentes, comme Shakespeare ou Einstein, Mozart ou Picasso, Marie Curie ou Le Corbusier. Il serait absurde de vouloir les faire rentrer dans une définition unique de l'intelligence. On pourrait dire plutôt qu'il y a différentes manières d'être intelligent : celle de l'artiste, du musicien, du patron, du théologien, de l'athlète, du vendeur, de l'instituteur, du mécanicien, de l'architecte, et bien d'autres.
Cela prouve l'absurdité de chercher à mesurer l'intelligence d'un être humain en se basant sur des tests de Q.I. qui veulent définir l'intelligence d'un être humain par un nombre, et d'une manière définitive, en négligeant d'autres aspects importants de la personne, comme certaines capacités artistiques ou relationnelles.
Malgré cela, on note actuellement une recrudescence, et un abus, de l'usage des tests de Q.I. Et je trouve très dommage que des parents “poussent” leur enfant dans leur scolarité en s'appuyant sur ce genre de tests. Découvrir les différentes intelligences de leur enfant me semble une approche bien plus intéressante, et plus respectueuse de leur développement.
Vous vous appuyez sur la théorie des “intelligences multiples”. Comment vous y êtes-vous intéressé ?
B. H. : C'est
à la suite d'un voyage scolaire en Autriche que j'avais organisé avec
mes élèves. Lors de ce voyage, j'avais remarqué que certains d'entre
eux avaient des talents exceptionnels (je dirais
maintenant des “intelligences fortes”) pour tourner une vidéo,
organiser une sortie ou régler des conflits, et malgré ces talents, ils
étaient en échec scolaire. Tout à coup, leur échec est devenu mon échec.
J'ai alors décidé de rechercher d'autres manières d'enseigner, en particulier en tirant parti des richesses des enfants qui sont peu ou pas du tout prises en compte dans le système scolaire.
Quelles sont ces intelligences multiples ?
B. H. : Le psychologue américain Howard Gardner, en s'appuyant sur des critères précis, a défini huit “intelligences”, qui sont toutes, pour lui, d'une importance équivalente.
Selon Howard Gardner, nous possédons à la naissance ces huit intelligences, qui sont encore potentielles mais que nous pourrons toutes développer, jusqu'à un bon niveau, tout au long de notre vie. Chacun développera ainsi un “bouquet d'intelligences” qui lui est propre, si possible d'une manière équilibrée.
Pourtant,
bien souvent, on constate que l'adulte que nous sommes a développé
certaines intelligences, dans lesquelles nous nous sentons à l'aise,
tout en laissant en sommeil d'autres intelligences : c'est très
dommage, autant pour les richesses dont nous nous privons, que pour les limitations que nous risquons d'introduire dans l'éducation de nos enfants.
L’école donne la priorité à l’utilisation et au développement des intelligences verbale et logique, sans attacher beaucoup d’importance aux autres formes (visuelle, corporelle…). A nous de les découvrir chez nos enfants pour les aider à devenir des adultes épanouis.
L’école prend-elle en compte les “intelligences multiples” ?
Bruno Hourst : On remarquera que, dans notre système scolaire, il est donné une importance surabondante aux intelligences verbale/linguistique
et logique/mathématique, et que l'on a tendance à considérer comme
superflues, ou du moins secondaires, l'utilisation et le développement
des intelligences musicale/rythmique, corporelle/kinesthésique, visuelle/spatiale, naturaliste, interpersonnelle et intrapersonnelle.
Si un enfant a essentiellement développé l'une ou l'autre de ces intelligences considérées comme secondaires, et peu les intelligences logique/mathématique et/ou verbale/linguistique, il aura du mal à apprendre à l'école et à montrer ses véritables capacités. Il risque l'échec scolaire.
Bien des adultes ont d'ailleurs vécu ce schéma : une scolarité difficile, parce que leur intelligence majeure n'était jamais sollicitée,
et une réussite professionnelle dès lors qu'ils pouvaient mettre en
œuvre cette intelligence forte. Certains chercheurs estiment d'ailleurs
que 80 % des échecs scolaires ont pour cause la non-reconnaissance et la non-utilisation des intelligences fortes des enfants.
Cependant,
il y a un lieu d'école où les “intelligences multiples” (même si on
n'emploie pas l'expression) sont naturellement sollicitées et
développées chez les enfants, c'est en maternelle.
À condition de ne pas leur faire brûler les étapes, à vouloir absolument les faire lire, écrire ou compter
avant leur entrée en primaire, en sollicitant ainsi uniquement leurs
intelligences verbale/linguistique et logique/mathématique. Il vaut
mieux développer harmonieusement chez eux toutes leurs intelligences. Et on constate que les apprentissages fondamentaux sont ensuite facilités, avec des enfants plus épanouis.
Que peuvent faire les parents pour développer toutes les intelligences de leur enfant ?
B. H. :
Je crois qu'il est intéressant d'infuser progressivement cette idée
d'intelligences multiples, dans toute la vie familiale, en particulier
en recherchant les intelligences utilisées dans telle ou telle activité.
Une simple promenade
au marché peut être l'occasion de développer de nombreuses
intelligences, si l'on y fait attention : se repérer dans l'espace
sollicite l'intelligence visuelle/spatiale ; payer, compter, peser… requiert de l'intelligence logique/mathématique ; découvrir un vocabulaire particulier développe l'intelligence verbale/linguistique ; découvrir les familles (de fruits, de légumes…) met en œuvre l'intelligence naturaliste ; faire prendre conscience de l'environnement sonore particulier du marché utilise l'intelligence musicale/rythmique, etc.
Il est également particulièrement intéressant d'initier son enfant à
cette notion d'intelligences multiples, et cela peut se faire dès 4 ans, en utilisant bien entendu un vocabulaire approprié.
On peut par exemple lui poser des questions comme : “Est-ce
que tu aimes parfois être seul pour réfléchir tranquillement ? Est-ce
que tu aimes comprendre comment les choses fonctionnent ? Est-ce que tu
aimes faire des constructions ?”, en lui expliquant que ce sont différentes manières d'être intelligent.
Observer son enfant permet, mieux que n’importe quel test, de repérer les formes d’intelligence qu’il utilise le plus et celles qu’il faut l’aider à développer. Toutes lui seront précieuses.
Comment identifier les intelligences fortes et les intelligences faibles de son enfant ?
Bruno Hourst : D'abord en évitant les tests !
On en trouve (sur Internet) qui sont contraires, à mon sens, à l'esprit
des intelligences multiples. Les parents risquent de cataloguer leur
enfant dans telle ou telle intelligence, alors que l'important, c'est
son “bouquet” d'intelligences. La meilleure manière de reconnaître les
intelligences fortes et faibles de son enfant, c'est tout simplement de
l'observer, dans ses activités à la maison et ses
manières de faire, dans les activités qu'il apprécie particulièrement
et celles qu'il pratique peu ou pas du tout.
Ensuite, une fois repérées ses intelligences “fortes” et “faibles”, il sera intéressant de lui proposer des activités
combinant les deux : en utilisant des intelligences fortes, il
acceptera de développer des intelligences où il est plus faible.
Chez un enfant qui a une intelligence corporelle/kinesthésique forte, il peut être intéressant de lui faire fabriquer des lettres de l'alphabet en pâte à modeler. À un enfant qui a une intelligence musicale/rythmique forte, on peut proposer de mémoriser des notions (les jours de la semaine ou les mois de l'année) en chansons ou en rythme.
En quoi est-ce essentiel de développer toutes nos intelligences ?
B. H. : J'y verrais trois grandes raisons. D'abord et avant tout pour développer d'une façon harmonieuse notre personnalité. Cela nous permettra toute notre vie de tirer parti de toutes les richesses qui nous sont proposées.
Ensuite, parce que la combinaison de toutes ces intelligences développe la créativité.
Pour prendre un exemple célèbre, Einstein a eu ses meilleures
intuitions non pas en faisant des calculs, mais en créant des images
mentales (intelligence visuelle/spatiale), et il jouait très
correctement du violon !
Enfin, posséder un bouquet d'intelligences bien développé et équilibré aidera l'enfant devenu adulte dans la réalisation de très nombreuses tâches,
qu'elles soient complexes ou supposées banales : bien conduire une
voiture, de manière responsable, nécessite une bonne utilisation des
intelligences verbale/linguistique, logique/mathématique,
visuelle/spatiale, corporelle/kinesthésique, interpersonnelle,
intrapersonnelle et naturaliste…
Les intelligences multiples semblent donc faire l’éloge de la diversité ?
B. H. : Tout à fait. Et c'est ce qui donne à cette approche, à mon sens, une portée humaniste très importante : l'autre est différent dans ses richesses, et il est intelligent différemment de moi. Nous avons tous les deux infiniment d'avantages à vivre et à travailler ensemble.
Le psychologue américain Howard Gardner a défini huit types d’intelligence, tous pour lui de la même importance. Comment, de l’intelligence verbale à l’intelligence naturaliste, se définissent-ils et se reconnaissent-ils chez l’enfant ?
L’intelligence verbale/linguistique
C'est la capacité à être sensible aux structures linguistiques sous toutes leurs formes. On la reconnaît chez l'enfant qui parle facilement, aime raconter des histoires ou en écouter, aime jouer avec les mots.
L’intelligence logique/mathématique
C'est la capacité à raisonner, à compter et à calculer, à tenir un raisonnement logique. On la reconnaît particulièrement chez l'enfant qui questionne, veut des raisons à tout, comprend bien le lien de cause à effet, cherche spontanément à dégager des règles et les principes de fonctionnement, aime expérimenter d'une manière logique.
L’intelligence visuelle/spatiale
C'est la capacité à créer des images mentales et à percevoir le monde visible avec précision dans ses trois dimensions. Elle est particulièrement développée chez les architectes, les peintres, les sculpteurs, les metteurs en scène… On la reconnaît chez l'enfant qui aime expliquer avec un dessin, est sensible aux couleurs et aux formes, aime arranger l'espace, a un bon sens de l'orientation, aime les puzzles.
L’intelligence musicale/rythmique
C'est la capacité à être sensible aux structures rythmiques, sonores et musicales. On la reconnaît particulièrement chez l'enfant qui fredonne souvent, retient une chanson avec aisance, se met à danser sur le moindre rythme, ressent les émotions exprimées par la musique.
L’intelligence corporelle/kinesthésique
C'est la capacité à utiliser son corps d'une manière fine et élaborée, à s'exprimer à travers le mouvement, à être habile avec les objets. On la reconnaît particulièrement chez l'enfant qui contrôle et coordonne bien les mouvements de son corps, aime toucher et manipuler les objets, aime les activités physiques, qui communique en montrant.
L’intelligence interpersonnelle
C'est la capacité à entrer en relation avec les autres. Elle est particulièrement développée chez les politiciens, les consultants, les enseignants, les vendeurs… On la reconnaît particulièrement chez l'enfant qui a beaucoup d'amis, s'intègre facilement dans un groupe, aime jouer à des jeux d'équipe, aime travailler avec les autres et les motive, joue au médiateur.
L’intelligence intrapersonnelle
C'est la capacité à avoir une bonne connaissance de soi-même. On la reconnaît particulièrement chez l'enfant qui apprécie d'être seul, sait se motiver, est capable d'autodiscipline, sait se fixer des buts réalistes, connaît ses forces et ses faiblesses.
L’intelligence naturaliste
C'est la capacité à observer la nature sous toutes ses formes, et la capacité de reconnaître et classifier des formes et des structures dans la nature. On la reconnaît particulièrement chez l'enfant qui aime être dehors, est sensible à son environnement naturel, est fasciné par la nature sous toutes ses formes, chez celui qui aime observer, regrouper et classer.